Une société spécialisée dans les systèmes embarqués automobiles va conclure des accords d’affichage publicitaire avec certains constructeurs.
Il n’aura pas fallu attendre très longtemps après la démocratisation de la voiture connectée pour que l’idée d’afficher des écrans publicitaires émerge dans l’esprit de certaines firmes.
La société spécialisée dans les dispositifs technologiques automobiles Telenav vient d’annoncer une « plate-forme publicitaire embarquée » pour les voitures qui se connectent à Internet. Telenav, qui indique déjà « Mobile Ads » dans sa panoplie d’offres commerciales, veut désormais vendre le système à de grands constructeurs automobiles.
L’idée sous-jacente n’est finalement pas très nouvelle et évoque cette bonne vieille maxime qui dit que « si c’est gratuit c’est toi le produit » : les propriétaires de véhicules paieront plus cher pour les services connectées s’ils refusent la publicité. Et BIM, suffisait d’y penser, n’est-ce pas ?
Si c’est gratuit, c’est le conducteur qui est le produit
« Cette approche aiderait les constructeurs automobiles à compenser les coûts liés aux services connectés, tels que les données sans fil, le contenu, les logiciels et les services cloud « , selon une porte-parole de Telenav. Du coup, en échange de l’acceptation d’annonces publicitaires sur les écrans du système d’info-divertissement de leur voiture, les conducteurs bénéficieraient de l’accès à des services connectés sans frais d’abonnement, ainsi que de nouvelles expériences de conduite issues des offres très ciblées et pertinentes délivrées sur la base des informations provenant du véhicule. Des marques comme Toyota, Lexus, Ford, GM ou encore Cadillac utilisent déjà des produits Telenav.
Dans un communiqué de presse, le CEO de Telenav H.P. Jin qualifie sans complexes la plate-forme publicitaire de « nouvelle opportunité pour les constructeurs automobiles de monétiser la connectivité pour couvrir les coûts de service et même générer des profits substantiels tout en enrichissant l’expérience du consommateur avec des offres attrayantes, pertinentes et livrées en toute sécurité. »
Il est vrai que, à l’instar d’un Google, d’un Facebook ou de n’importe-quel autre GAFAM, une entreprise qui fournit des systèmes embarqués en automobile accède à des millions de données en temps réel, et cette collecte de big data est d’autant plus massive qu’une voiture est aujourd’hui dotée de milliers de capteurs qui chacun transmettent des informations très précises, non seulement sur les déplacements mais également sur les comportements de conduite. Tout cela intéresse grandement les compagnies d’assurances, mais pas seulement.
Des « services » et « offres promotionnelles » ciblés et géolocalisés
Dans son communiqué de presse, Telenav explique comment elle mettrait ces données à la disposition des annonceurs. A titre d’exemple, les publicités pertinentes, telles que les coupons et les recommandations, seraient fournies aux clients annonceurs en fonction des informations fournies par le véhicule, y compris les itinéraires fréquents, les destinations et l’heure de la journée. Ainsi, les automobilistes pouraient être encouragés à acheter une pizza à prix réduit en rentrant chez eux ou être avertis des ventes dans les magasins situés près de leur destination. En outre, lorsque le véhicule est à bas niveau d’essence, le services indiquerait les stations voisines le long de l’itinéraire du conducteur, potentiellement avec des offres promotionnelles.
La plupart des annonces seraient statiques, bien que certaines seraient animées, et les annonces ne contiendraient pas d’audio. D’autre part, pour raisons de sécurité et pour éviter de distraire le conducteur, les publicités n’apparaitraient que lorsque le véhicule est arrêté, par exemple au démarrage de la voiture, aux feux de circulation et à l’arrivée à destination. Les annonces publicités disparaitraient automatiquement lorsque la voiture est en mouvement ou lorsque les utilisateurs interagissent avec d’autres fonctions du tableau de bord, comme la musique ou les appels téléphoniques.
Des précautions qui ne seront plus de mise avec les voitures autonomes, dans lesquelles la distraction du conducteur ne sera plus une question essentielle.
De la voiture connectée à la « voiture-média »
Cette approche, aussi dérangeante et exaspérante qu’elle puisse paraître aujourd’hui, sera certainement inévitable dans un avenir assez proche. Les voitures actuelles disposant d’une connexion à internet proposent déjà des services ciblés et géolocalisés, ainsi que des informations pratiques. Nous allons passer de l’ère de la voiture connectée à celle de la « voiture-média », à bord de laquelle on consommera également des contenus spécifiques. Renault l’a d’ailleurs déjà anticipé en prenant une participation majoritaire dans le groupe médias Challenges. Les déplacements en voiture autonome vont libérer du temps de cerveau disponible, un temps considéré par les constructeurs et producteurs de contenus comme un immense gisement de services à proposer. C’est ce qu’Audi appelle « la 25ème heure ».
Alors bien sûr, certains y trouveront peut-être leur compte, en bénéficiant par exemple d’une connectivité gratuite et sans abonnement en échange de l’affichage de quelques publicités, mais le système n’en demeure pas moins pervers.
Car là où le bât blesse, c’est que comme dans un média classique, il faudra payer pour ne pas être submergé de publicités. Or un constructeur automobile n’est pas un média, ses sources de revenus sont ailleurs, et nous payons déjà assez cher pour le savoir. J’ai toujours trouvé anormal, voire indécent, d’être soumis à des annonces publicitaires alors que j’ai déjà payé pour un service ou un contenu. C’est le cas par exemple au cinéma, où, bien que vous ayez payé votre billet (cher), vous devez subir 20 minutes de publicité avant un film. C’est le cas également avec la presse écrite, où la publicité représente souvent plus de la moitié du contenu alors que cous avez déjà déboursé plusieurs euros pour acheter un journal. J’ai toujours considéré cela comme un abus. Soit on facture un service et on bâtit un modèle économique sain et vertueux autour (abonnements, souscriptions, vente de services…), soit on se finance par la publicité et alors on ne facture rien en plus. Ce que prépare Telenav – et probablement une bonne partie des constructeurs automobiles – s’inscrit dans ce modèle foireux du cinéma ou de la presse écrite.
Automobilistes, préparez-vous à subir la double peine si chère aux autres médias : payer ET recevoir de la pub.
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