Les États-Unis enterrent la neutralité du Net

C’est officiel ! La FCC a voté la fin de la neutralité du Net laissant craindre l’avènement d’un internet à deux vitesses. Et une contagion européenne ?

Watchmen

C’est un des principes fondateurs d’internet qui vient d’être mis en terre, malgré la levée de boucliers des « pionniers du web » parmi lesquels Tim Berners-Lee, l’inventeur du World Wide Web (WWW), et Vinton Cerf, le « père de l’internet ».

Le jeudi 14 décembre, le régulateur américain des télécommunications, la FCC (Federal Communications Commission), a mis fin à la neutralité du Net en adoptant (à 3 voix contre 2) la circulaire « Restoring Internet Freedom » (« restaurer la liberté d’internet » en VO). Pour la Commission ce principe était un frein à l’innovation et à l’investissement.

La neutralité du Net garantit la non-discrimination des flux transitant sur le réseau. Autrement dit, les FAI doivent traiter tous les contenus de manière égalitaire, sans en prioriser certains (haut débit), en bloquer d’autres ou les ralentir (bas débit). N’importe quel type de contenu doit vous parvenir à la même vitesse.

Consacré en 2017, anéanti en 2017

C’est en 2015, sous l’impulsion de Barack Obama, que la FCC sacralise le principe dans sa forme la plus stricte et fait des FAI des « transporteurs publics », les assimilant à des entreprises de télécommunications au même titre que Verizon Wireless ou TMobile.

Le nouveau président de la FCC, Ajit Pai

Avec ce vote, les entreprises technologiques craignent l’avènement d’un internet à deux vitesses soumis au bon vouloir des opérateurs. Ces derniers pourraient en effet imposer un passage en caisse aux entreprises souhaitant avoir une vitesse de débit normale ou accélérée pour leurs contenus. Les petites entreprises seraient désavantagées, ne pouvant rivaliser avec les mastodontes de la Silicon Valley.

Un risque de concurrence déloyale

Certains, comme Netflix, pourraient répercuter ces frais supplémentaires sur les abonnements. D’un autre côté, les FAI auraient également tout loisir de favoriser leurs propres contenus. AT&T, qui cherche depuis quelque temps à acquérir Time Warner, pourrait prioriser les contenus du groupe (HBO, CNN, Warner Bros) et ralentir ceux des concurrents comme Netflix, Facebook ou Prime Video par exemple.

« Nous sommes décus par la décision d’abattre les protections de la neutralité du net qui amorce le début d’une ère sans précédent pour l’innovation, la créativité et l’engagement civique. C’est le début d’une longue bataille juridique. Netflix est aux côtés des innovateurs petits et grands, pour s’opposer à cette décision malencontreuse de la FCC », a réagi Netflix dans un Tweet.

Pour le président de la FCC, Ajit Pai, et les partisans de l’abrogation, la régulation est un frein à l’innovation et aux investissements dans le secteur. Désormais, les FAI, comme Verizon, dont Ajit Pai a été l’avocat pendant deux ans, pourront opérer à leur guise avec pour seule limite de gérer la hiérarchisation des contenus de leurs clients de manière transparente, c’est-à-dire indiquer clairement les contenus priorisés, ceux ralentis, etc.

Bientôt une contagion européenne ?

Une telle décision est-elle possible en Europe ? L’Union européenne a consacré le principe en novembre 2015 (règlement des télécommunications) non sans l’assortir de quelques exceptions – zero rating et services spécialisés sont autorisés.

Pas suffisante pour contenter les opérateurs qui mènent un intense lobbying pour renverser la tendance. Le PDG d’Orange, Stéphane Richard, est un opposant de la première heure de la neutralité du net qu’il qualifie de « concept attrape-tout qui se fait toujours sur le dos des opérateurs ».

« Moi aussi, j’aimerais bien qu’internet soit gratuit dans le monde entier. Mais ça n’est possible que dans les rêves […] Il faut donner aux opérateurs les armes et les moyens d’innover. Et la neutralité du net est l’ennemie de l’innovation des opérateurs », expliquait-il encore en 2015.

crédits : Flickr

Profitant de l’éminence du vote américain, il a réitéré ses propos estimant que la fin de la neutralité du net était « une obligation », évoquant la nécessité de créer « plusieurs Internets » pour les applications futures comme la télémédecine, la voiture autonome ou la ville intelligente.

Pour le patron de l’Arcep, Sébastien Soriano, la décision US « n’aura pas d’impact direct en Europe ». L’Europe ayant tendance à se calquer sur les États-Unis pour tout ce qui touche à Internet, la vigilance reste de mise.

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