Et si je vous disais qu’il y a dans votre ordinateur un mouchard que vous ne pouvez pas enlever, qui a \u00e9t\u00e9 mis en place par le constructeur, qui est sur les listes blanches de la plupart des antivirus et dont vous n’avez jamais entendu parler ?<\/strong><\/p>\n La soci\u00e9t\u00e9 Kaspersky, sp\u00e9cialis\u00e9e dans la d\u00e9tection et l’\u00e9limination de malware a d\u00e9busqu\u00e9 il y a quelques mois un logiciel install\u00e9 sur plus de 2 millions d’ordinateurs de par le monde qui est commercialis\u00e9 par la soci\u00e9t\u00e9 Absolute et qui permet OFFICIELLEMENT :<\/p>\n <\/a><\/p>\n Et qui est OFFICIEUSEMENT un trou b\u00e9ant dans la s\u00e9curit\u00e9 de votre ordinateur, car il peut \u00eatre utilis\u00e9 par un attaquant pour faire ce qu’il veut sur votre PC.<\/p>\n Le plus flippant l\u00e0 dedans, c’est qu’apr\u00e8s les r\u00e9v\u00e9lations de Kaspersky, personne ou presque n’en a parl\u00e9 dans la presse ou sur les sites sp\u00e9cialis\u00e9s. Bouuuh !<\/p>\n L’histoire de cette d\u00e9couverte n’est pas banale. La femme d’un des chercheurs de Kaspersky a constat\u00e9 des plantages et des ralentissements sur son ordinateur. Elle l’a donc confi\u00e9 \u00e0 son mari qui a commenc\u00e9 \u00e0 analyser la bestiole, pensant y trouver un virus connu. Il est alors tomb\u00e9 sur des dll et des processus appartenant au logiciel Absolute Computrace<\/strong>.<\/p>\n Jusque l\u00e0, rien de vraiment anormal puisque Absolute Computrace<\/strong><\/a> et son \u00e9quivalent grand public LoJack<\/strong><\/a> sont vendus \u00e0 des tas de soci\u00e9t\u00e9s pour que les administrateurs puissent suivre \u00e0 la trace les machines, lancer des audits, faire des mises \u00e0 jour…etc., le tout \u00e0 distance.<\/p>\n Seulement, l’employeur de la dame n’avait jamais entendu parler de ce logiciel. Les chercheurs de Kaspersky ont alors commenc\u00e9 \u00e0 regarder autour d’eux et se sont rendu compte qu’il y avait exactement le m\u00eame logiciel install\u00e9 sur leurs ordinateurs du boulot et leurs ordinateurs personnels.<\/p>\n Angoisse !<\/p>\n Ils ont alors men\u00e9 une enqu\u00eate plus approfondie et voici ce qu’ils ont d\u00e9couvert. Computrace se divise en 3 modules pr\u00e9sents dans l’option ROM PCI<\/a> qui est charg\u00e9e ensuite par le BIOS de la machine.<\/p>\n <\/a><\/p>\n <\/a><\/p>\n Cette \u00ab\u00a0option\u00a0\u00bb Computrace est normalement visible dans le BIOS des machines et est mise en place par le fabricant de l’ordinateur. Absolute est fi\u00e8re de compter parmi ses clients des constructeurs comme\u00a0Acer, Apple, ASUS, Dell, Fujitsu, Gateway, HP, Lenovo, Microsoft, Panasonic, Samsung, Sony et Toshiba.<\/span> Ah oui, j’oubliais… M\u00eame si Kaspersky ne s’est pench\u00e9 que sur la version PC Windows, Computrace \/ LoJack existe aussi en version smartphone \/ tablette (Android<\/a>) et Mac OSX<\/a>.<\/p>\n Edit: Il semble que cette derni\u00e8re phrase n’ait pas \u00e9t\u00e9 comprise par tous. Je vais tenter de mieux l’expliquer. L’agent Computrace est un logiciel qui peut s’installer volontairement. Cet agent est dispo sous Linux, Windows, Android et MacOSX. Seulement pour le moment et jusqu’\u00e0 preuve du contraire, seuls certains PC Windows sont \u00e9quip\u00e9s d’un Computrace par d\u00e9faut log\u00e9 dans le bios et capable de d\u00e9ployer son agent sous Windows. Pour MacOSX \u00e7a ne semble pas \u00eatre le cas. En tout cas, personne n’a encore creus\u00e9 dans cette direction. Et pour Android, aucune preuve n’a \u00e9t\u00e9 apport\u00e9 non plus, m\u00eame si certains t\u00e9l\u00e9phones et tablettes sont marqu\u00e9s par Absolute (voir liste ci-dessous) comme \u00e9quip\u00e9 d’un Computrace. Bref, pour les PC Windows on est s\u00fbr car Kaspersky a bien analys\u00e9 tout le bordel mais pour OSX et Android, c’est non-prouv\u00e9.<\/em><\/p><\/blockquote>\n En ce qui concerne Computrace sur PC, il est normalement d\u00e9sactivable dans le BIOS mais pas dans tous, puisque certains des ordinateurs analys\u00e9s par Kaspersky n’avaient m\u00eame pas cette option visible dans le BIOS et contenaient pourtant l’agent Computrace.<\/p>\n <\/a><\/p>\n L’int\u00e9r\u00eat d’une telle pr\u00e9sence dans le BIOS de la machine, c’est la persistance du programme. Que vous r\u00e9installiez, formatez ou changiez de disque dur, le tracker sera toujours pr\u00e9sent. N’esp\u00e9rez pas pouvoir l’effacer en mettant \u00e0 jour votre BIOS. Non, car il est pr\u00e9sent dans une partie non modifiable et si vous flashez votre BIOS avec un nouveau firmware, il ne sera pas d\u00e9gag\u00e9.<\/p>\n <\/a><\/p>\n Voici comment il fonctionne.<\/p>\n D\u00e8s l’initialisation du BIOS, le module Computrace scanne les partitions FAT\/FAT32\/NTFS de la machine \u00e0 la recherche du r\u00e9pertoire Windows. Il fait une copie de sauvegarde du logiciel autochk.exe<\/a> et le remplace par sa propre version modifi\u00e9e.<\/span><\/strong><\/p>\n Autochk.exe ayant un acc\u00e8s complet aux fichiers et \u00e0 la base de registre de Windows, cela permet \u00e0 Computrace d’installer son agent rpcnetp.exe<\/strong> dans le r\u00e9pertoire System32 puis de l’enregistrer comme un service \u00e0 lancer automatiquement \u00e0 chaque d\u00e9marrage.<\/span><\/strong><\/p>\n Une fois que c’est fait, il restaure la sauvegarde de autochk.exe.<\/span><\/strong><\/p>\n Rpcnetp.exe enregistre alors sa DLL rcpnetp.dll et l’injecte en m\u00e9moire. Un processus masqu\u00e9 utilisant iexplore.exe (Internet Explorer) est alors lanc\u00e9 et permet de communiquer avec le serveur de gestion de Computrace via des URL classiques (avec des POST et des GET). Passer par Internet Explorer permet d’utiliser les m\u00eames proxys et la m\u00eame config que ceux de l’internaute. Des donn\u00e9es sont envoy\u00e9es et re\u00e7ues entre cet agent et les serveurs d’Absolute, ce qui peut provoquer des ralentissements sur la machine.<\/span><\/strong><\/p>\n <\/a><\/p>\n Ce module t\u00e9l\u00e9charge alors un autre agent baptis\u00e9 rpcnet.exe<\/strong> qui est un peu plus gros, mais qui se comporte sensiblement de la m\u00eame mani\u00e8re que rpcnetp.exe. Il s\u2019immisce dans le syst\u00e8me et d’apr\u00e8s Kaspersky, permet de donner un acc\u00e8s distant et complet \u00e0 la machine sur laquelle il tourne. En gros, il s’agit d’un logiciel de tracking et de prise de contr\u00f4le \u00e0 distance.<\/span><\/strong><\/p>\n Computrace utilise les m\u00eames techniques de filou que les logiciels malveillants et cherche d\u00e9lib\u00e9r\u00e9ment \u00e0 se cacher de l’utilisateur. La raison est d’\u00e9viter qu’un voleur de portable le remarque, et puisse masquer sa localisation ou bloquer Computrace.<\/span><\/strong><\/p>\n Computrace marque aussi avec un ID unique la machine, ce qui permet de l’identifier de mani\u00e8re s\u00fbre.<\/p>\n En analysant les trames r\u00e9seau \u00e9chang\u00e9es entre les agents et le serveur de gestion, Kaspersky a remarqu\u00e9 qu’il \u00e9tait possible \u00e0 n’importe qui d’injecter \u00e0 distance n’importe quel code afin de l’ex\u00e9cuter sur la machine. Le protocole utilis\u00e9 n’\u00e9tant pas chiffr\u00e9, n’exigeant pas d’authentification de la part du serveur gestionnaire et les serveurs appel\u00e9s l’\u00e9tant via de simples URL, il est possible de faire croire \u00e0 l’agent Computrace qu’il discute avec son serveur de gestion alors qu’il s’agit d’un attaquant qui a d\u00e9tourn\u00e9 quelques DNS. L’attaquant peut alors lancer du code sur la machine, acc\u00e9der aux fichiers, r\u00e9cup\u00e9rer les trames r\u00e9seau..etc.<\/p>\n Potentiellement, tous les ordinateurs infect\u00e9s par Computrace sont des botnets en puissance. Kaspersky a aussi remarqu\u00e9 \u00e0 plusieurs reprises que Computrace s’activait imm\u00e9diatement sur des PC neufs.<\/p>\n Kaspersky a aussi contact\u00e9 la soci\u00e9t\u00e9 Absolute et leur a fourni des num\u00e9ros de s\u00e9rie de mat\u00e9riels qui contenaient l’agent Computrace. Absolute n’a aucune trace de ces appareils dans sa base de donn\u00e9es. Cela signifie que Computrace a \u00e9t\u00e9 activ\u00e9 sur ces machines par un autre canal que celui \u00ab\u00a0officiel\u00a0\u00bb d’Absolute. Jusqu’\u00e0 aujourd’hui, \u00e7a reste un myst\u00e8re.<\/span><\/strong><\/p>\n D’apr\u00e8s les sondes de Kaspersky, voici la r\u00e9partition dans le monde des ordinateurs \u00e9quip\u00e9s de Computrace \/ LoJack.<\/span><\/strong><\/p>\n <\/a><\/span><\/strong><\/p>\n <\/p>\n Au total, ce sont plus de 2 millions de postes qui seraient infect\u00e9s par Computrace. Tous les constructeurs seraient touch\u00e9s, ce qui est logique puisqu’ils sont partenaires d’Absolute. Ces chiffres sont bien s\u00fbr r\u00e9duits puisqu’ils sont \u00e9t\u00e9 remont\u00e9 uniquement par les postes o\u00f9 les logiciels de Kaspersky sont install\u00e9s.<\/span><\/strong><\/p>\n <\/p>\n <\/a><\/p>\n Seul Toshiba a reconnu avoir pr\u00e9-install\u00e9 Computrace sur ses machines. Les autres ne se sont pas exprim\u00e9s sur le sujet.<\/p>\n Le probl\u00e8me avec Computrace, c’est qu’il n’est pas reconnu comme un logiciel malveillant par la plupart des antivirus. Il l’a \u00e9t\u00e9 pendant un moment, notamment par Microsoft qui l’a nomm\u00e9 Win32\/BeeInject, mais a ensuite \u00e9t\u00e9 retir\u00e9 des listes de d\u00e9tection.<\/p>\n <\/a><\/p>\n En effet, comme il s’agit d’un logiciel l\u00e9gitime de tracking et prise de contr\u00f4le \u00e0 distance qui est vendu par une soci\u00e9t\u00e9 reconnue et qu’il est pr\u00e9sent sur un grand nombre de machines, il figure sur la plupart des listes blanches.<\/p>\n On n’en connait pas les raisons, mais les constructeurs l’ont mis en place sur leurs ordinateurs progressivement depuis 2005 sans avertir leurs clients. Et Computrace \u00e9tant vuln\u00e9rable \u00e0 tout un tas d’attaques et de d\u00e9tournements, il s’agit l\u00e0 d’une v\u00e9ritable backdoor affaiblissant les ordinateurs sur lesquels il se trouve.<\/p>\n Cela soul\u00e8ve tout un tas de questions, parmi lesquelles :<\/p>\n Pour cette derni\u00e8re question, vu tout ce qu’on a appris durant cette ann\u00e9e sur la surveillance globale (merci, Snowden), y compris durant l’affaire Heartbleed<\/a>, on est en droit de penser que oui.<\/p>\n Alors, maintenant que faire ?<\/p>\n Tout d’abord, si votre ordinateur fait partie de cette liste, vous \u00eates l’heureux propri\u00e9taire d’un agent Computrace. F\u00e9licitations !<\/p>\n\n
\n
\n